À retenir
- Date de lancement : 16 septembre 2025, par Google.
- Objectif principal : Combler le « fossé de confiance » dans les transactions initiées par des agents IA, en garantissant autorisation, authenticité et responsabilité.
- Technologie clé : Utilisation de Verifiable Credentials (VCs), des preuves cryptographiques infalsifiables pour tracer l’intention de l’utilisateur jusqu’au paiement.
- Partenaires majeurs : Mastercard, American Express, PayPal, Coinbase, Adyen, Revolut, et 55 autres organisations.
- Méthodes de paiement supportées : Cartes de crédit/débit, virements bancaires en temps réel, stablecoins (via l’extension A2A x402).
- Compatibilité : Intégration avec les protocoles existants Agent2Agent (A2A) et Model Context Protocol (MCP).
- Disponibilité : Spécifications techniques et implémentations de référence publiées sur GitHub.
AP2 : un protocole pour sécuriser les paiements pilotés par l’IA
Le Protocole de Paiements par Agents (AP2) de Google répond à un défi croissant : comment garantir que les transactions initiées par des agents IA — qu’ils soient autonomes ou semi-autonomes — respectent l’intention de l’utilisateur, sans compromettre la sécurité ou la responsabilité ? Avec l’essor des assistants virtuels capables d’effectuer des achats, des réservations ou des abonnements, les systèmes de paiement traditionnels, conçus pour des interactions humaines, montrent leurs limites. AP2 introduit une couche cryptographique et standardisée pour valider chaque étape, de l’intention initiale au règlement final.
Le « fossé de confiance » : un obstacle majeur au commerce agentique
Le commerce piloté par des agents IA se heurte à trois questions fondamentales :
- Autorisation : L’utilisateur a-t‑il explicitement délégué le pouvoir d’agir à l’agent ?
- Authenticité : La transaction reflète‑t‑elle fidèlement ses préférences (budget, délais, produits) ?
- Responsabilité : Qui assume les risques en cas d’erreur ou de fraude — l’utilisateur, l’agent, le marchand ou le processeur de paiement ?
AP2 résout ces problèmes en formalisant un langage commun cryptographiquement vérifiable. Ce langage permet aux agents, aux commerçants et aux processeurs de paiement d’échanger des preuves fiables à chaque étape : intention → panier → paiement. Sans cette infrastructure, le commerce agentique risque de rester fragmenté, avec des solutions propriétaires incompatibles entre elles.

Les Verifiable Credentials : la pierre angulaire d’AP2
Au cœur d’AP2 se trouvent les Verifiable Credentials (VCs), des objets numériques signés cryptographiquement qui servent de preuves infalsifiables. Ces credentials sont utilisés pour trois types de mandats :
| Type de mandat | Description | Exemple d’usage |
|---|---|---|
| Mandat d’Intention | Capture les contraintes définies par l’utilisateur pour les transactions futures (ex : limite de prix, catégories de produits autorisées). | Un agent peut acheter un billet de train, mais uniquement en classe économique et pour un trajet inférieur à 300 €. |
| Mandat de Panier | Lie l’approbation explicite de l’utilisateur à un panier spécifique, signé par le commerçant. | L’utilisateur valide un panier sur un site e‑commerce avant que l’agent ne finalise le paiement. |
| Mandat de Paiement | Informe les réseaux de paiement (cartes, stablecoins) de l’implication d’un agent IA dans la transaction. | Un processeur comme Mastercard reconnaît que la transaction est initiée par un agent, mais vérifie que les mandats précédents sont valides. |
Ces VCs forment une piste d’audit complète, reliant sans ambiguïté l’autorisation initiale de l’utilisateur à la demande de paiement finale. Par exemple, si un agent achète un produit hors budget, le mandat d’intention invalide la transaction avant même qu’elle n’atteigne le processeur de paiement.
Une architecture basée sur les rôles pour limiter les risques
AP2 définit une séparation claire des responsabilités entre six acteurs :
- Utilisateur : Définit les mandats et valide les transactions.
- Agent/Agent d’achat : Exécute les tâches dans les limites des mandats.
- Fournisseur de Credentials (ex : portefeuille numérique) : Stocke et gère les VCs.
- Point de terminaison du commerçant : Reçoit et vérifie les mandats.
- Processeur de paiement (ex : Adyen, Worldpay) : Traite la transaction.
- Réseau & Émetteur (ex : Mastercard, Revolut) : Valide et exécute le paiement.
Cette segmentation réduit l’exposition des données sensibles. Par exemple, les numéros de carte de crédit ne transitent jamais par l’agent : ils restent confinés dans le Fournisseur de Credentials, comme un portefeuille sécurisé. Les mandats signés peuvent aussi intégrer des signaux de risque (ex : géolocalisation inhabituelle) sans révéler l’identité complète de l’utilisateur aux contreparties.
Interopérabilité et écosystème : comment AP2 s’intègre aux infrastructures existantes
Pour éviter de créer un silo technologique, Google a conçu AP2 comme une extension des protocoles existants, en collaboration avec plus de 60 partenaires industriels. Cette approche permet aux développeurs de réutiliser des infrastructures éprouvées, tout en ajoutant une couche dédiée aux paiements par agents. Le protocole supporte aussi bien les méthodes traditionnelles (cartes, virements) que les actifs numériques, comme les stablecoins.

Une coalition de 60 partenaires pour standardiser le commerce agentique
Le lancement d’AP2 s’appuie sur un écosystème diversifié, incluant :
- Réseaux de paiement : Mastercard, American Express, UnionPay International.
- Processeurs et fintechs : PayPal, Adyen, Revolut, Worldpay.
- Actifs numériques : Coinbase (stablecoins), Mysten Labs (blockchain).
- Plateformes marchandes : Etsy, ServiceNow.
- Logiciels d’entreprise : Intuit (comptabilité).
L’adoption d’AP2 par des acteurs comme Mastercard et PayPal montre que l’industrie reconnaît la nécessité d’un standard ouvert pour le commerce agentique. Sans interopérabilité, chaque plateforme développerait sa propre solution, ce qui fragmenterait le marché et limiterait l’innovation.
Compatibilité avec les cartes, virements et stablecoins
AP2 est agnostique en matière de méthode de paiement : il peut s’appliquer à :
- Cartes de crédit/débit : Via les réseaux traditionnels (Mastercard, American Express).
- Virements bancaires en temps réel : Intégration avec les systèmes comme SEPA en Europe.
- Stablecoins : Grâce à l’extension A2A x402, développée avec Coinbase pour opérationnaliser les paiements en actifs numériques.
Pour les stablecoins, AP2 s’appuie sur le protocole de paiement de Coinbase, permettant aux agents d’initier des transactions en USD Coin (USDC) ou d’autres actifs indexés, avec les mêmes garanties de traçabilité que pour les cartes bancaires. Par exemple, un agent pourrait payer un abonnement SaaS en USDC, avec une piste d’audit vérifiable par le marchand et le réseau.
Intégration avec les protocoles Agent2Agent et Model Context Protocol
AP2 ne part pas de zéro : il s’appuie sur deux standards existants pour étendre leurs capacités aux paiements :
- Agent2Agent (A2A) : Protocole de messagerie inter‑agents, utilisé pour la découverte et la négociation entre systèmes autonomes. AP2 ajoute une couche de paiement à A2A, permettant à un agent d’acheter un service auprès d’un autre agent (ex : réservation d’un hôtel via un assistant voyage).
- Model Context Protocol (MCP) : Standard pour l’accès aux outils et APIs. AP2 l’utilise pour connecter les agents aux processeurs de paiement, en réutilisant les mécanismes d’authentification existants.
Cette approche modulaire permet aux développeurs d’adopter AP2 sans refondre leurs systèmes. Par exemple, une entreprise utilisant déjà A2A pour la logistique peut ajouter le volet paiement avec AP2, sans changer son infrastructure de base.
Avantages et limites : ce que change AP2 pour utilisateurs, marchands et développeurs
AP2 ne se contente pas de sécuriser les transactions : il redéfinit les rapports de confiance entre les parties prenantes du commerce numérique. Pour les utilisateurs, il offre une délégation contrôlée ; pour les marchands, une réduction des fraudes ; pour les développeurs, un cadre standardisé. Cependant, son adoption soulève aussi des questions sur la confidentialité et la gouvernance future du protocole.
Bénéfices concrets pour chaque acteur
| Acteur | Avantages | Exemple |
|---|---|---|
| Utilisateurs | Un assistant personnel peut renouveler un abonnement Netflix dans la limite de 15 €/mois, sans risque de dépassement. | |
| Marchands | Un site e‑commerce comme Etsy peut vérifier qu’un achat initié par un agent respecte bien les mandats de l’acheteur. | |
| Développeurs | Un développeur peut ajouter des paiements par agent à une app en réutilisant les APIs Stripe ou Adyen. |
Confidentialité et sécurité : des garanties, mais des défis persistants
AP2 améliore la sécurité en :
- Limitant la circulation des données sensibles (ex : numéros de carte).
- Fournissant une piste d’audit infalsifiable.
- Permettant des vérifications de risque sans exposer l’identité complète.
Cependant, deux enjeux subsistent :
- Centralisation des credentials : Si le Fournisseur de Credentials (ex : un portefeuille Google) est compromis, les mandats pourraient être falsifiés. Google répond que les VCs sont signés par l’utilisateur et stockés de manière distribuée.
- Vie privée : Les mandats contiennent des métadonnées (ex : habitudes d’achat) qui pourraient être exploitées à des fins publicitaires. Le protocole permet des preuves à divulgation nulle (zero‑knowledge proofs) pour limiter ce risque, mais leur implémentation dépend des fournisseurs.
Prochaines étapes : vers une normalisation ouverte
Google a publié les spécifications techniques d’AP2 sur GitHub, avec des implémentations de référence en open source. Les prochaines phases incluent :
- Itérations communautaires : Les développeurs et partenaires peuvent proposer des améliorations via un processus ouvert.
- Alignement avec les organismes de standardisation : Collaboration avec le W3C pour les Verifiable Credentials et l’IETF pour les protocoles de paiement.
- Extension des cas d’usage : Intégration avec des secteurs comme la santé (paiements d’ordonnances par agents) ou l’IoT (achats automatisés par des appareils connectés).
L’adoption des stablecoins via l’extension A2A x402 sera un test clé pour AP2. Si des acteurs comme Coinbase et Revolut généralisent son usage, le protocole pourrait devenir un pont entre les monnaies traditionnelles et les actifs numériques dans le commerce agentique.
Verdict : AP2, un standard prometteur mais encore en construction
AP2 comble un vide critique dans l’écosystème des paiements : l’absence de cadre de confiance pour les transactions initiées par des agents IA. Ses atouts majeurs — interopérabilité, support multi‑méthodes, et piste d’audit cryptographique — en font une solution plus robuste que les approches propriétaires. Cependant, son succès dépendra de trois facteurs :
- L’adoption par les géants du paiement : Mastercard et PayPal sont à bord, mais que feront Visa ou Apple Pay ?
- La simplicité pour les utilisateurs : Les mandats doivent rester intuitifs, sans ajouter de friction.
- La gouvernance ouverte : Google devra prouver que AP2 ne deviendra pas un standard contrôlé par un seul acteur.
Pour les entreprises françaises et européennes, AP2 offre une opportunité de se positionner tôt sur le commerce agentique, en s’appuyant sur des partenaires locaux comme Revolut ou Adyen. À suivre de près : les premières intégrations grand public, prévues pour 2026.
















